La nouvelle Constitution guinéenne de 2025 : enjeux, innovations et défis institutionnels
I. Contexte et genèse du projet constitutionnel
La Guinée, indépendante depuis 1958, a traversé plusieurs révisions constitutionnelles, souvent motivées par des transitions politiques ou des crises institutionnelles.
Le coup d’État militaire du 5 septembre 2021, mené par le colonel Mamadi Doumbouya, a suspendu la Constitution de 2020 et instauré un régime de transition.
Dans ce contexte, le gouvernement de transition a initié un processus de rédaction d’une nouvelle Constitution, visant à restaurer l’ordre constitutionnel et à renforcer les institutions démocratiques du pays.
Le 21 septembre 2025, un référendum a été organisé pour permettre à la population de se prononcer sur l’adoption de cette nouvelle Constitution.
Les résultats préliminaires ont révélé un soutien massif, avec 89,38 % de « oui » et une participation de 86,42 % des électeurs inscrits.
II. Principales innovations et implications institutionnelles
La nouvelle Constitution guinéenne introduit plusieurs réformes significatives :
Régime présidentiel renforcé : Le président de la République est élu pour un mandat de sept ans, renouvelable une fois, contre six ans précédemment.
Il conserve des pouvoirs étendus, notamment la nomination du Premier ministre, la conduite de la politique extérieure et la direction des forces armées.
Création d’un Sénat : La Constitution instaure un parlement bicaméral, avec l’ajout d’un Sénat chargé de valider les nominations aux hautes fonctions civiles et militaires.
Extension des droits fondamentaux : Des garanties accrues sont prévues pour les droits sociaux, l’égalité des genres et l’inclusion des groupes marginalisés.
Renforcement de la décentralisation : La Constitution prévoit une autonomie accrue des collectivités locales, visant à rapprocher l’administration des citoyens.
Indépendance de la justice : Des mécanismes sont mis en place pour assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire et renforcer les institutions de contrôle.
III. Débats et controverses autour du processus constitutionnel
Malgré ces avancées, le processus de rédaction et d’adoption de la nouvelle Constitution a suscité des débats :
Accusations de dérive autoritaire : Des critiques ont émergé concernant la concentration des pouvoirs entre les mains du président et le rôle dominant de la junte militaire dans le processus constitutionnel.
Exclusion de l’opposition : Des figures majeures de l’opposition, telles qu’Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo, ont été exclues du processus, en raison de leur âge ou de leur exil, ce qui a été perçu comme un verrouillage politique.
Répression des libertés : Des rapports font état de répressions à l’encontre de militants et de journalistes, ainsi que de restrictions à la liberté d’expression, ce qui soulève des inquiétudes quant au respect des droits humains.
IV. Application et défis de mise en œuvre
L’adoption d’une nouvelle Constitution représente une étape importante, mais sa mise en œuvre effective pose plusieurs défis :
Consolidation de l’État de droit : Assurer l’indépendance réelle des institutions judiciaires et des organes de contrôle est essentiel pour garantir l’application des principes constitutionnels.
Participation citoyenne : La mobilisation de la société civile et des citoyens est cruciale pour veiller à la transparence et à la responsabilité des autorités publiques.
Réconciliation nationale : Un dialogue inclusif et la réconciliation des différentes forces politiques et sociales sont nécessaires pour renforcer la cohésion nationale et assurer la stabilité politique.
La nouvelle Constitution guinéenne de 2025 offre un cadre juridique ambitieux pour la consolidation de la démocratie et le renforcement des institutions. Cependant, sa réussite dépendra de la volonté politique des autorités, de l’engagement de la société civile et du respect des principes démocratiques.
Il est impératif que les réformes annoncées se traduisent par des actions concrètes et que les défis de mise en œuvre soient relevés pour garantir un avenir démocratique et prospère à la Guinée.
